15 avril 2020

Pierre Wantiez: "il ne suffit pas de reprendre. Il faut aussi pouvoir finir."

Après un peu plus un mois d'arrêt de la compétition, nous faisons le point sur la situation avec Pierre Wantiez, le Directeur Général du HAC. Interview :
Pierre Wantiez: "il ne suffit pas de reprendre. Il faut aussi pouvoir finir."
Pierre Wantiez, voici plus d’un mois maintenant que le championnat s’est arrêté, quelles dispositions ont été mises en œuvre durant ces quatre semaines de confinement ?
La gestion s’est adaptée à ce qui était au départ un confinement pour quinze jours, mais dont on imaginait assez aisément qu’il pourrait durer plus longtemps. La 1ère urgence a été de privilégier la protection de tous. Nombre de salariés ont arrêté immédiatement, ou très vite, de venir sur leur lieu de travail, soit parce qu’ils pouvaient fonctionner en télétravail depuis chez eux, soit parce que leur activité était interrompue. Une très grande majorité du personnel est arrêtée, mais certains ont encore une activité, partielle ou complète. Le groupe professionnel a cessé de travailler dès le lundi 16 mars, avant même de venir à l’entraînement programmé le matin. Il reste toutefois quelques fonctions actives. Notamment les fonctions financières, car nous sommes comme les autres confrontés à d’importantes problématiques sociales et économiques, mais il faut aussi assurer la surveillance et la maintenance du stade et des installations du HAC, qui mobilisent des personnels.


Aujourd’hui, quelles sont les conséquences humaines, sportives et financières pour le club ?
Chacun réagit à sa façon en fonction de sa personnalité et des conditions dans lesquelles il est confiné. Je ne veux pas m’exprimer pour tout le monde, chaque situation est différente, mais tous le vivent comme un moment très dur. Encore plus pour ceux qui ne travaillent plus, et sont coupés d’une partie de ce qui fait leur vie. Il y a un sentiment de mal-être que je ressens quand j’ai des collaborateurs au téléphone. Concernant le Club plus globalement, il y a un sentiment brutal de vide. La raison d’être d’un club est de générer de la passion et des émotions, de contribuer à la vie locale, de créer de la vie et de l’activité, de l’événement notamment autour du football, mais pas exclusivement, et toute cette part du HAC est aujourd'hui anesthésiée.

Mais regardons devant nous. Ce qui se passe aujourd'hui est terrible, c’est une parenthèse douloureuse et pesante dans nos vies, avec beaucoup d’inquiétude, mais ce n’est qu’une parenthèse. Cette crise sanitaire majeure a aussi des conséquences économiques très importantes pour le club. Le HAC, comme tout club, a deux grandes sources de recettes régulières : l’organisation de matchs et les droits TV. Nous ne percevons plus rien, alors que nous continuons à faire face à l’essentiel de nos charges. Nous avons la chance d’avoir en France un dispositif qui amortit l’impact de cette situation, et pour avoir échangé avec des acteurs du football étranger, ils envient la situation française, mais ces aides ne couvrent pas toutes les pertes. Avec de plus la spécificité d’avoir des salariés à un niveau de revenu au-delà du plafond des aides. Il n’est pas question de se plaindre, ce serait indécent, mais il est utile d’expliquer à ceux qui suivent et aiment le HAC pourquoi cette situation crée de grandes difficultés économiques à leur club, comme c’est le cas dans tous les autres clubs en France.


Comment gérer les relations avec les supporters mais aussi les partenaires qui sont des entreprises elles aussi confrontées à de grandes difficultés ?
A cette heure, et c’est pour nous une immense satisfaction, très peu d’abonnés ou d’entreprises partenaires se sont manifestés pour demander des compensations. Or tous vivent dans le même environnement et avec les mêmes difficultés que nous. Comme si tout le monde comprenait que dans une situation aussi exceptionnelle, il faut rester solidaires. On ignore encore aujourd’hui si le championnat 2019/2020 va reprendre ou pas, mais le club réfléchit déjà aux différentes scénarii possibles, et aux réponses à apporter.


"La priorité absolue reste la lutte collective contre ce virus infernal"

Le championnat doit-il absolument reprendre pour aller à son terme ? La LFP a avancé la date du 17 juin ?
Le championnat doit-il reprendre ? ma réponse est oui au nom de deux principes : le premier, c’est que la vie doit et va reprendre, et que le football en fait partie comme aller au restaurant, au cinéma … mais aussi parce que lorsque l’on commence une compétition, il faut aller au bout. On peut s’interroger sur l’importance de jouer au football dans ce contexte, mais je suis à titre personnel convaincu que nous devons tout à la fois prendre en compte la crise sanitaire et nous tourner vers l’avenir et le rebond, nécessaire, indispensable.

Peut-il reprendre ? c’est la vraie question. La priorité absolue reste la lutte collective contre ce virus infernal. On ne peut pas imaginer reprendre la compétition si la situation générale ne s’est pas profondément améliorée, et si l’activité générale n’a pas repris, au moins partiellement. Vouloir jouer au football dans une société à l’arrêt n’aurait pas de sens. Les déclarations lundi soir du Président de la République entrouvrent la porte, mais seule l’évolution de la situation permettra ou pas de finir ce championnat.

Parce qu’il ne suffit pas de reprendre. Il faut aussi pouvoir finir. Ce qui suppose d’être dans bonnes conditions. Si l’on découvre un joueur contaminé dans un club, s’arrête-t-on à nouveau ? et si oui, avec quelles conséquences ? Il y a un certain nombre de questions sur lesquelles beaucoup travaillent. Est-ce que les joueurs peuvent reprendre après une semaine d’entraînement collectif, bien évidemment que non. Si le championnat peut repartir le 17 juin comme envisagé par la LFP, nous aurons donc eu une interruption de trois mois, beaucoup plus long qu’une trêve estivale. Les spécialistes (entraîneurs, préparateurs athlétiques et médecins) estiment qu’il faudrait idéalement un mois pour retrouver des joueurs pleinement opérationnels, et donc retrouver le chemin de Soquence mi-mai.

Il faut surtout que chacun comprenne et admette qu’à situation exceptionnelle, réponses exceptionnelles. La position du HAC est très claire : nous souhaitons aller au bout de ce championnat, par principe, pour ne pas aggraver la situation économique des clubs, et aussi, je veux être honnête, parce que je suis convaincu que ce championnat n’est pas encore terminé pour nous. Mais s’il était impossible, ou simplement déraisonnable, de jouer ces 10 derniers matchs (et d’éventuels barrages), nous l’accepterons. Nous respecterons ce qui aura été décidé dans l’intérêt collectif. Gardons aussi en tête qu’il n’y aura pas de réponse parfaite. Arrêter le championnat aujourd'hui n’est pas non plus une réponse parfaite, les équipes qui ne sont qu’à quelques points du maintien ou de la tête du championnat pourraient se sentir lésées. Si nous en venions à l’hypothèse d’une saison blanche (ni montées ni descentes, hypothèse à laquelle personnellement je ne crois pas du tout), les équipes concernées pourraient là encore se sentir lésées. Donc, j’insiste, il n’y aura pas de solution parfaite et nous devrons tous accepter les décisions qui seront prises.


Il est imaginable que tous les clubs, en fonction de leur classement, n’arrivent pas à se remettre dans les meilleures conditions mentales pour reprendre la compétition ?
C’est vrai, c’est une question que l’on peut se poser. On pourrait se retrouver dans la situation d’un championnat avec des équipes bien calées au milieu du tableau à quelques journées de la fin, cela s’appelle les aléas du calendrier. Ça l’est aussi dans un championnat « normal ».

On peut aussi imaginer qu’une équipe reprenne mal et s’effondre, qu’une équipe aujourd’hui bien classée glisse vers le milieu de tableau, ou qu’une équipe de milieu de tableau qui se croyait à l’abri se retrouve menacée par la relégation. On peut aussi croire en une remontée forte pour un groupe qui saurait transformer l’adversité en source de motivation. J’en profite pour souligner le professionnalisme des joueurs et du staff (sportif mais aussi médical). Même très perturbés par la situation, et c’est facilement compréhensible, ils restent de vrais professionnels, les interventions régulières d’Olivier Rodriguez sur notre site internet en sont la démonstration et pour ma part j’échange régulièrement avec Paul. Personne ne considère la saison comme terminée.


Il est impossible de parler de cette crise sans évoquer les droits TV qui représentent la majeure partie des revenus des clubs professionnels. Quelles seraient les conséquences dans ce domaine en cas d’arrêt du championnat ?
Il y aurait des conséquences importantes. Nous serions privés d’une partie des droits TV, que les diffuseurs refusent de payer. C’est en tout cas leur position aujourd’hui, mais est-elle définitive ? La position qu’ils défendent, et notamment leur refus de payer pour des matchs déjà diffusés, ne me parait pas logique. Je pense – en tout cas je l’espère – que chacun saura faire un pas vers l’autre. Nous dépendons en effet aujourd'hui beaucoup des droits que payent les télévisions, qui sont devenus un acteur économique central et incontournable. Nous en dépendons comme tous les clubs en France et en Europe. Mais le transfert de Tino vers l’Olympique Lyonnais en janvier nous permet d’affronter l’avenir avec détermination.


Le transfert de Tino Kadewere en janvier pour 12 M€ (+ 2 M€ de bonus) peut-il être considéré comme la bouée de sauvetage du HAC ?
Non, parce que même sans le transfert de Tino, le club aurait fait face à ses obligations. Mais parmi les paramètres qui nous ont décidés à accepter de transférer Tino, il y a ce que j’appelle « le bon sens », qui repose sur trois critères : celui d’avoir des conditions économiques qui soient acceptables par le HAC - et elles l’étaient -, celui que ce soit le choix de Tino – ça l’était très clairement - et le troisième critère - qui faisait sourire certains qui nous expliquaient que nous aurions à coup sûr beaucoup plus au mois de mai -, est que « un tiens vaut mieux que deux tu l'auras ». Nous savons qu’aujourd'hui nous avons assuré la pérennité du club. Si nous devions vendre Tino actuellement, nous serions probablement sur des montants inférieurs de 30 à 50% . Nous n’imaginions alors pas du tout le risque lié au Covid-19, mais nous savions qu’anticiper était une option raisonnable. Ceci ne nous empêche pas d’avoir à court terme les mêmes difficultés économiques que tous les autres clubs : sans entrer dans les détails, un transfert de ce montant et de cette nature (Tino restant avec nous jusqu’à la fin de la saison) ne se paie pas en une seule fois.


Propos recueillis par Emmanuel Lelaidier

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