9 mars 2024

André Ayew: "On sous-estime la puissance du HAC en France !"

André Ayew a posé ses valises au HAC en novembre dernier. Le capitaine du Ghana, à la carrière éloquente, nous parle du HAC, de la saison en cours, mais aussi de son enfance et de son père, le célèbre Abedi Pelé…
André Ayew: "On sous-estime la puissance du HAC en France !"
Depuis ton arrivée, quelles sont tes impressions sur le HAC ?
Je suis très content d’être là, c’est un très bon club familial, avec de bons supporters, un bon groupe, avec un staff qui nous fait bosser énormément, un très bon coach, des joueurs autour, de bons adjoints, Mathieu Bodmer… C’est une bonne petite famille, j’aime beaucoup ! Les gens connaissent le foot. Certains ont joué à haut niveau, comme Nico Douchez, Mathieu Bodmer, Serge Costa a côtoyé beaucoup de gens, le coach a fait des clubs à l’étranger… C’est beaucoup d’expérience emmagasinée dans le monde du football, avec un club qui veut retrouver des moments de joie. Ça avait commencé déjà l’année dernière… J’adore. Je suis content. On dit que c’est le bon choix quand on atteint ses objectifs, c'est-à-dire ici le maintien, mais si on veut parler de ce que je suis en train de vivre sportivement ou humainement, retrouver toutes mes sensations, bien connaître le groupe, progresser même à mon âge sur certaines choses, oui, sur ce côté-là, c’est le bon choix.

Es-tu conscient que, pour les supporters havrais, ton arrivée est aussi inattendue que grandiose ?
Je peux le comprendre ! Dans la vie, il y a des étapes que tout le monde franchit, que des clubs franchissent. Je suis persuadé que mon arrivée ici va en amener d’autres. Il y a un début à tout ! Je serais content si j’amorçais la venue de joueurs avec beaucoup d’expérience, de matches internationaux. Cela va aider le club. L’identité du club est de former beaucoup de joueurs et de les emmener au plus haut niveau, mais il n’est pas impossible de faire venir des joueurs avec du vécu, j’en suis la preuve. C’est le club, c’est le coach, c’est Mathieu… J’ai pris le temps d’analyser, de réfléchir. Quand je vois tous ces gens autour, ce qui est proposé au niveau football, stade, public, ville, et humainement… C’est ce que je recherchais à cet instant précis.

Qu’as-tu ressenti lors de l’accueil que tu as reçu à ton arrivée ?
J’ai adoré. J’ai compris qu’il fallait passer au boulot ! (rires) Tu arrives, il y a beaucoup d’amour, d’affection, de respect de la part des supporters. La seule manière de leur rendre, c’est certes de leur parler, d’être gentil, d’être moi-même, mais surtout de tout donner sur le terrain pour faire gagner leur club. C’est pour ça que je suis là. Il faut continuer à bosser, j’ai encore pas mal de choses à faire, il reste dix matches. On a tous du boulot, j’ai ma part, et je me prépare pour ça.

Avant de signer ici, le HAC, ça te parlait ?
Mais tout le monde connaît Le Havre ! On sous-estime la puissance de ce club en France. C’est le club doyen, il a quand même fait pas mal de temps en Ligue 1, c’est un club qu’on connaît ! Le HAC a un vrai nom ! Beaucoup de joueurs, de grands joueurs, sont passés ou ont été formés là. J’ai joué avec Mandanda, Mendy, Niang, Diawara, Samba… Que des joueurs formés ici ! Après, c’est vrai qu’il y a eu de longues années en Ligue 2, j’avais joué au stade Deschaseaux avec Arles-Avignon l’année, nous avions gagné 2-1 l’année de notre montée en Ligue 1, j’avais mis le doublé ! (rires) En arrivant ici, même si ce n’était pas les meilleures périodes du HAC, on savait qu’on allait jouer la grosse équipe de Ligue 2 !

Tu renvoies l’image d’un passionné de foot. Ça te va quand on te qualifie comme ça ?
Oui, parce que c’est la réalité ! Je suis un passionné, j’adore le foot, tout ce qui va avec. J’aime regarder, j’aime jouer, j’aime m’investir sur le terrain et en dehors… C’est ma vie !

C’est dur d’être le fils d’Abedi Pelé ?
Oui. D’être le fils d’un triple Ballon d’or africain, d’un joueur qui a gagné la Ligue des Champions avec l’OM… Pour passer après ça, c’est difficile… Mais j’ai réussi. Je suis content, fier… Ce n’était pas quelque chose de facile, tu as toujours l’étiquette « fils de »… On se demande si tu n’es pas là à cause de papa…. Tu dois toujours prouver deux ou trois fois plus que les autres, tu es toujours sous pression… Mais je n’ai pas lâché parce que c’était mon rêve de réussir dans le foot, et d’abord à l’OM, et de continuer ma carrière. C’était une obsession. J’ai bossé pour aller vers ce but-là et je l’ai atteint.

C’était donc vraiment ta passion depuis tout petit.
Je suis né dans le ballon, je voulais continuer dans ça ! Mon petit frère aussi, mon grand frère aussi… C’est notre vie, c’est ce qui nous a faits, c’est ce qui nous rend uniques, que ce soit dans notre pays ou dans tout le continent africain. Nous avons énormément de matches en sélection pour une famille, que ce soit mon père, mon oncle, mes frères… Cinq membres de la famille Ayew ont joué pour l’équipe nationale du Ghana ! C’est notre vie, on espère que nos enfants viendront prendre le relais ! (rires) On verra !

Comment était ton enfance ?
J’ai suivi mon père partout, Lille, où je suis né, Marseille, Turin, Munich, et jusqu’à Al Aïn… A l’époque, il n’y avait pas d’école française là-bas, alors nous étions restés quelques mois puis mon petit frère et moi étions repartis à Lille, chez ma tante et mon oncle. Quand mon père a eu fini sa carrière, nous sommes tous rentrés au Ghana. J’y ai poursuivi ma formation jusqu’à ce que je sois repéré par l’OM à 14 ans.

Evidemment, être capitaine du Ghana est pour toi une immense fierté ! Comme être recordman du nombre de CAN disputées !
Oui ! Ce n’est pas facile… On continue… On ne lâche pas… Être capitaine de ma nation, c’est monstrueux ! Cela fait peut-être cinq ou six ans, et j’ai été vice-capitaine pendant six ou sept ans. Très jeune, je faisais partie des cadres. L’équipe nationale, c’est quelque chose qui me touche profondément, c’est très important pour moi. Evidemment, plus l’âge passe, plus on arrive vers la fin ! Quand ? Je ne sais pas… Quand je porte ce maillot, c’est comme si c’était à chaque fois le premier jour. Le porter me surprend… c’est quelque chose de bizarre… Parfois, dans certains clubs, je me réveillais le matin en n’ayant pas toujours envie de m’entraîner, en étant fatigué… C’est comme ça, c’est humain ! Mais en sélection, c’est différent. J’ai vu mon père en sélection, c’était mon rêve d’enfant d’y jouer moi aussi, d’avoir tout ce que j’ai pu accomplir, et j’espère encore accomplir quelques belles choses avant d’arrêter un jour la sélection.

Quel est ton meilleur souvenir avec la sélection ?
Il y a eu pas mal de finales de CAN, champion du monde U20, champion d’Afrique U20, j’ai le plus grand nombre de sélections, 119… Pas mal de choses me trottent dans la tête mais on cherche tous la CAN. On est passé tellement de fois à côté, en finale, en demies, que ça nous reste en travers de la gorge. J’ai beaucoup de très bons moments, de magnifiques, des qualifications pour la Coupe du monde, de quart de finale de Coupe du monde, beaucoup de choses… Il y en a plus de bonnes que de mauvaises, mais avec les générations qu’on a eues, qu’on a, il nous faut ce trophée. Il faut trouver ce petit truc pour nous permettre de basculer du bon côté.

Et en club, ton meilleur souvenir ?
Avec l’OM, j’ai beaucoup de bons souvenirs. Le premier trophée, la Coupe de la Ligue, le Trophée des Champions. Mais je pense que le meilleur souvenir, c’est le huitième de finale de Ligue des Champions, quand je marque de la tête le 1-0 à la 93e minute face à l’Inter (22 février 2012)… Le stade explose… Et aussi quand je marque mon premier but au Stade Vélodrome contre le PSG (20 mars 2011). Ce sont de grands moments, surtout en tant que formé au club. A l’époque, la rivalité était très forte ! Alors marquer dans ce match, et marquer aussi au Parc, c'est inoubliable. Quand on est au centre de formation de l’OM, on rêve de jouer un classico ! Et j’en ai joué pas mal ! Alors je suis fier et très content. Le Vélodrome, quand ça marche bien, il n’y a pas mieux ! Marseille, c’est Marseille ! Et j’ai une relation particulière avec les supporters, ils savent que j’ai toujours tout donné. Je n’ai pas toujours été le meilleur sur le terrain, mais j’ai toujours tout donné, mouillé le maillot. Ils pouvaient compter sur moi. C’était réciproque, je savais qu’ils ne me lâcheraient pas, même quand j’étais dans une période plus compliquée. Ça, ça n’a pas de prix.

Des entraîneurs t’ont-ils marqué plus que d’autres ?
Didier Deschamps ! Pour moi, c’est le meilleur que j’ai eu. Il n’est pas champion du monde pour rien… Il a gagné le championnat avec Marseille, il a été finaliste de la Champion’s League avec Monaco. Et ça, juste en tant qu’entraîneur, je ne parle même pas en tant que joueur ! Bielsa aussi, ce n’était pas mal, mais différent, deux personnalités différentes. Bielsa est plus quelqu’un qui veut te faire progresser. Même si tu as 30 ans, tu peux toujours être meilleur. Tant que tu joues, tu peux être meilleur ! Il n’est pas que fixé sur la victoire, il la veut, mais avec une philosophie différente. Didier Deschamps, lui, trouve sa manière de gagner. Il n’est pas là pour faire de cadeaux, il est là pour gagner. Il a un très bon management. Ce sont deux personnes différentes, deux coaches différents, avec qui j’ai eu de bonnes relations.
Il y a aussi Steve Cooper à Swansea, que j’ai retrouvé à Nottingham. Très bon coach, avec son idée footballistique, son style de jeu, humainement… Si j’ajoute la sélection, il y a aussi Claude Leroy, pour moi le summum du football africain, et il était là avec Hervé Renard comme adjoint. J’ai eu aussi Avram Grant, de Chelsea, c’était aussi vraiment bon ! J’ai eu pas mal de bons coaches, je suis fier !

Et des joueurs qui t’ont marqué ?
Samir Nasri, c’était fort, Ben Arfa, c’était fort… C’étaient mes coéquipiers à Marseille ! Lucho Gonzalez, Mathieu Valbuena, Dimitri Payet… Notre génération était forte ! On avait une belle équipe ! (rires) Benoît Cheyrou, Diawara… C’est dur... Celui qui avait ce truc en plus, c’était Samir Nasri. Mais il est parti vite, je n’ai pas vraiment joué longtemps avec lui. Donc, je dirais Payet et Valbuena. Les deux ensemble… Ils m’ont fait énormément de passes décisives, alors je les adore ! (rires)

As-tu encore des rêves à réaliser ?
Oui ! Sinon j’arrêterais. Je n’ai que 34 ans, je vois des joueurs de 38 ou 39 ans qui gagnent encore des trophées ! Oui, il y a des rêves, et on va les accomplir petit à petit.

Que manque-t-il au HAC pour repartir sur une bonne série à ton avis ?
Un peu de chance ! Et la chance, ça se provoque, et on va la provoquer ! Ces derniers matches où les résultats ne sont pas allés de notre côté, on a un peu l’impression de ne pas être récompensés de nos efforts, des matches, des contenus qu’on a livrés, de l’envie, de la détermination qu’on a montrées, que ce soit contre Rennes, contre Reims ici, ou ce qu’on est partis faire à Brest… Mais ça ne va pas rester comme ça. On doit continuer à pousser. Ça va être dur, ça peut se jouer au dernier jour !

Tu comptes aussi sur le public !
Enormément ! Ici, on le sent ! Nos matches, à domicile et à l’extérieur n’ont pas la même puissance. Ce public nous pousse, nous transcende ! Le maintien, on ne va pas le faire seuls ! On a besoin de nos supporters. Tout ce qu’ils font depuis le début, c’est magnifique, c’est extraordinaire ! On espère qu’ils vont continuer comme ça et nous aussi allons essayer d’augmenter notre niveau de performance et leur offrir une victoire. On veut que ce soit dès dimanche, on va tout faire pour ça.

En dehors des terrains, que fais-tu quand tu ne regardes pas des matches ?
Je me repose beaucoup. Je ne sors pas énormément, je suis plus casanier. La ville du Havre me plaît, avec le bord de mer, c’est très familial, les gens sont très gentils, très accueillants, en tout cas avec moi !

Regardes-tu d’autres sports ?
Un peu le basket, le tennis aussi. Maintenant peut-être un peu moins, il n’y a plus Federer, Nadal… J’attends de voir la nouvelle génération, Alcaraz… Et Djoko est toujours là !

Si pendant 24 heures tu étais un autre sportif qu’André Ayew, tu serais qui ?
Mon père ! C’est la star africaine, la star du Ghana, c’est le boss ! Le premier à avoir trois Ballons d’or africains, 90, 91, 92… Il est respecté partout, plusieurs chefs d’Etat sont ses amis… J’aimerais bien voir comment il vit tout ça parce que je sais qu’à notre niveau c’est déjà très compliqué… Il reste la grande star du pays, l’homme le plus aimé du pays, le plus connu, dès qu’il sort, c’est l’émeute encore, et il a toute la famille derrière, nous sommes tous au-dessous de lui, c’est comme ça l’Afrique, c’est lui le boss. J’aimerais voir comment il analyse, parce qu’il a la pression, ses enfants jouent au très haut niveau, en sélection, avec des gens qui les adorent, d’autres qui ne les aiment pas, les jaloux… Comment en tant que papa, star, tu peux gérer tout ça, être dans sa tête…

As-tu déjà pensé à ce que tu ferais après ?
Il y a beaucoup d’idées mais je ne m’avance pas trop dessus. Comme je ne sais pas combien de temps je vais jouer encore et que je ne me fixe pas de limites au niveau football, je mets juste certaines choses en place, tout ce que je pense que je peux faire. Plus jeune, je pensais plutôt que ce qui devait arriver arriverait, mais maintenant, je sais qu’il faut mettre des choses en place pour l’après-carrière, j’en ai discuté avec plusieurs anciens. C’est dur de décider ce que tu veux faire ! C’est notre vie qui s’arrête ! Depuis que tu as dix ans, tu joues au foot ! Chaque année, chaque moment qui passe t’emmènent, te guident vers ce que tu veux vraiment. Mon épouse me suit, merci à elle ! Pour moi, c’est une chance.

Propos recueillis par Olivia Detivelle
AuxerreVSHAC
Auxerre - HAC
04/05/2025
17:15 - Stade Abbé Deschamps -dazn
HACVSMonaco
HAC 1 - 1 Monaco
26/04/2025 - 19:00 - Stade Océane -
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32ème journée
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