23 août 2025

Didier Digard : "Les années du centre ? Les plus belles de ma vie !"

Entamant sa deuxième saison en tant qu’entraîneur du HAC, Didier Digard revient sur ses années à la Cavée-Verte, sur le caractère qu’il lui fallut pour s’imposer, mais aussi sur sa passion pour le football…
Didier Digard : "Les années du centre ? Les plus belles de ma vie !"
Petit, qu’est-ce qui te fait découvrir le football ?
J’ai toujours été attiré par ça. Mon père regardait beaucoup le foot à la télé. C’était un sport facile, accessible, qui faisait que j’étais toujours avec du monde. Du jour où j’ai commencé, je n’ai jamais arrêté, il n’y a que ça qui m’ait plu.

Avais-tu tenté d’autres sports en parallèle ?
Non, à part la boxe, le seul autre sport que j’aie voulu tenter. Mais bizarrement, il faut être très calme pour la boxe, et c’était trop compliqué pour moi… (rires)

Donc, le foot représentait tous tes loisirs, voire plus que des loisirs ?
Je n’avais pas l’ambition que ce soit un métier, c’était vraiment une passion. J’y jouais absolument tous les jours, que ce soit à l’école, à la récré, après l’école, les week-ends… Je n’ai jamais arrêté.

A-t-on décelé rapidement chez toi des qualités et t’a-t-on fait comprendre que ça pouvait évoluer professionnellement ?
J’ai été très rapidement surclassé, je l’ai toujours été. Je comprenais que je n’étais pas trop mal, mais comme c’était mon père le coach, il ne me l’a jamais dit. Il était vraiment très dur avec moi. Je pense que c’était aussi pour me protéger, pour que je ne me fasse pas d’illusions ou quoi que ce soit. Mais ensuite, je suis parti très vite de chez moi, je suis venu très tôt ici, et après, ici, c’est forcément un discours différent parce que ça devient un potentiel métier et c’est beaucoup plus pro.

Tu arrives donc au HAC très jeune, à 12 ans. C’était dur ?
Mes parents m’ont laissé prendre la décision quand nous sommes venus ici, quand nous nous sommes retrouvés dans le bureau de M. Foissac, qui m’a fait part de l’intérêt du club pour moi. Je me souviens que mes parents m’ont regardé et m’ont dit : « C’est toi qui décides. » Ce qui est bien est qu’on est un peu insouciant, vraiment, sur le coup de la décision… Après, il faut assumer cette décision, et se retrouver ici tout seul, où c’est compliqué, et surtout parce qu’il y avait aussi une opportunité comme le PSG qui était beaucoup plus proche de chez moi et où ç’aurait été certainement moins difficile. Le HAC avait une super réputation, et je préférais venir ici parce que c’était un club qui faisait confiance aux jeunes. J’avais un ami passé par le centre de formation. Au début, je suis venu faire des entraînements, des matches avec eux pour m’intégrer, et l’ambiance était vraiment très bonne, tu voyais déjà le lien entre les joueurs, entre les générations, et même si je pense qu’à cet âge-là, tu as le rêve mais vraiment très lointain potentiellement de devenir pro, tu te dis qu’ici, l’opportunité est belle.

Allais-tu à Deschaseaux voir les matches des pros ?
Oui, à chaque match ! Franchement, les années du centre, ce sont les années les plus belles de ma vie ! C’était fantastique ! Ça a été vraiment pour moi très dur de quitter mes amis, on passait toutes nos journées ensemble, foot, école, on était toujours ensemble. Mais tu viens ici, et, finalement, c’est la même chose. Tu te fais des nouveaux potes, on a tous la même ambition, on fait tous les mêmes journées, on est tous ensemble, on dort ensemble… Franchement, c’était magnifique.

C’était comment, l’école ?
C’était correct au niveau des notes. Je n’ai jamais redoublé, j’ai eu quelques petits problèmes de comportement. Parce que, c’est toujours pareil, tu arrives dans un nouveau milieu, un nouveau contexte, et si tu veux réussir, il ne faut pas qu’on te marche dessus. Et tu n’es pas chez toi ! Il faut donc faire un peu plus que les autres… Ça a failli me porter préjudice, mais j’ai eu des éducateurs et des gens au sein du club qui ont été bienveillants et qui ont compris que c’était un trait de ma personnalité !

Justement, si tu avais un éducateur et un pote à retenir de ces années-là ?
Un éducateur, forcément, je dirais Momo Sall ! Sans lui et M. Foissac, qui était la personne qui m’a recruté mais aussi prof de sport au collège Jean-Moulin, il est vrai que par rapport à tous ces écarts de conduite, je ne serais certainement plus ici ! Ce sont vraiment les deux personnes qui ont changé les choses. Après, tous les éducateurs, tous les entraîneurs, même en pros, m’ont apporté quelque chose, mais eux ont forcément une petite particularité. Après, un ami, forcément, je dirais Steve Mandanda. Il y a beaucoup de personnes dont je suis encore proche, Kev Anin aussi, mais c’est vrai qu’avec Steve, on ne s’est jamais quittés, et je trouve assez marrant d’être partis en même temps dans deux clubs aux entités totalement différentes, et moi avoir changé de pays, etc., et qu’on ne soit jamais restés peut-être une semaine sans prendre de nouvelles. On part tous les ans en vacances ensemble, on échange sur tout, et ça fait du bien quand c’est une personne qui peut avoir ton ressenti, qui sait ce que tu vis. Et lui plus qu’un autre, parce qu’avec tout ce qu’il a vécu, il n’a jamais changé. Et ça, je pense qu’il y en a vraiment très peu.

Tu as été papa dès l’âge de 16 ans. As-tu l’impression que, sans ça, sans cette motivation supplémentaire, tu aurais réussi quand même ?
Je pense, parce que j’étais vraiment en avance. Mais on va dire que c’est devenu une motivation. Donc, après, dans ta mentalité, c’est différent. Je ne dis pas que les choses venaient à moi mais tout se faisait naturellement, de toujours être surclassé, de toujours jouer avec ceux du dessus. Mais je pense que le fait d’avoir un enfant, tu te dis que même si ça ne vient pas, tu iras le chercher, et forcément, tu as une responsabilité à assumer. Tu ne peux plus te permettre d’attendre qu’on te donne les choses.

Tout le monde n’a pas cette mentalité-là à cet âge-là. Même plus vieux !
Il y a du bon et du mauvais dans tout, mais c’étaient des règles différentes. De pouvoir si tôt, d’être le plus jeune, d’être dans un centre où il y a beaucoup d’égo, beaucoup de caractère, de devoir te faire ta place, d’aller dans un collège où c’est très chaud, où tu n’es pas chez toi, ça te forge un caractère bien au-dessus de la moyenne. Si tu es prêt à ça, si tu as envie. Et après, je ne vais pas dire que tout est facile mais tu es quand même prêt pour pas mal de défis !

Changerais-tu quelque chose justement dans tes années de formation, que ce soit par rapport au sportif, à l’école ?
Non, rien. Franchement, rien. Bien évidemment, j’aurais aimé ne pas me battre autant à l’école ou au centre, mais en fait, c’est grâce à ça que j’ai réussi, c’est ce qui m’a construit. Si des professeurs parlaient de moi, oui, ils diraient ça, que j’étais tout le temps à me battre et tout le temps viré à cause de ça. Mais sur les études ou les notes, j’étais toujours bien. Ça m’a forgé le caractère : ne jamais rebrousser chemin, affronter, y aller. C’est marrant, maintenant, la plupart des gens de cette ville qui n’étaient pas du centre, ce sont des amis, ce sont des gens que je vois qui ont apprécié ça, le petit blond, avec la coupe au bol, qui ne reculait devant rien ! (rires)

Tu joues trois ans en pro au HAC, et en 2007, tu signes au PSG. A l’époque, tu vis cela comme un aboutissement ?
Signer à Paris, c’est quelque chose qui change ta vie à tout jamais, parce que jouer dans un club comme ça, c’est incroyable. Après, je pense que je le fais un petit peu par peur ! Je le fais parce que c’est à côté de chez moi, j’ai l’impression de me rapprocher de chez moi. J’ai l’impression que je n’ai rien vécu avec ma famille : je pars de chez moi à 12 ans, ma relation avec mes parents, encore aujourd’hui, elle n’est pas comme celle d’un enfant normal. Mon père est supporter de Paris, je me rapproche de la maison… J’ai envie de dire que je choisis la facilité ! C’est certainement l’un des étés où j’ai eu le plus d’opportunités, le plus de propositions. Je pense que, même si c’est un très bon choix pour moi, avant tout, je choisis la facilité.

Ce n’est pas évident à regarder comme ça, le PSG, la facilité !
A cette époque, des équipes jouant la coupe d’Europe me font des propositions, aussi des équipes anglaises, le rêve de tout le monde. On est sur un Paris avec ce côté historique, mais on n’est pas sur les grandes années de Paris. Même si, chaque année à Paris, tu te dis que cette année sera la bonne. Bien évidemment, il y a ce côté sportif, mais je pense que je n’ai pas réellement tout pesé pour faire un choix et que je me suis surtout dit qu’en fait, oui, je me rapprochais de la maison. Je n’étais pas loin du Havre, aussi, je pense que je venais une fois par semaine ou une fois toutes les deux semaines ! Je continuais à venir aux matches ici, et j’ai eu du mal à couper. C’était dur, ça faisait neuf ans que j’étais ici ! Tout s’était passé ici, je n’avais connu que ça. Je gardais donc tous mes potes, tous mes repères, j’étais à la fois proche de chez mes parents, proche d’ici. C’était un choix facile, au final !

Quand tu regardes ta carrière de joueur pro, qu’en penses-tu ?
C’est toujours difficile. Forcément, entre le jeune que j’étais, les qualités que j’avais, et la carrière que j’ai eue, il y a un décalage. Après, je ne pense pas qu’on puisse changer les blessures. Bien évidemment, j’aurais aimé voir ma carrière sans blessures. Parce que, au final, tous ceux qui ont fait une excellente carrière, quand on était en sélections de jeunes, c’est à moi qu’ils aimaient donner le ballon ! Mais, là où je suis content, c’est quelque chose qui me sert énormément aujourd’hui. C’est pour cela que je ne veux rien changer, parce que ça forge l’homme et l’entraîneur que je suis aujourd’hui d’avoir vécu toutes ces choses. Donc, si je parle d’un aboutissement personnel de footballeur, j’aurais aimé voir ma carrière sans blessures, mais vu le chemin que j’ai choisi pour la suite, je n’ai pas envie de changer les choses parce que ça me sert énormément.

"Je veux toujours le meilleur plus pour les autres que pour moi"

Penses-tu que tu pourrais t’accomplir davantage en tant qu’entraîneur qu’en tant que joueur ?
Oui, je pense. Je pense vraiment parce que déjà, je ne peux pas me blesser ! (rires) En fait, ça fait partie de moi, la vie d’un vestiaire, la vie d’un groupe, les conseils… C’est quelque chose qui me plaît. Je veux toujours le meilleur plus pour les autres que pour moi. Pour les joueurs, je choisirai toujours le conseil qui va les amener le plus haut possible, ne serait-ce qu’évoluer un minimum. Je pense que même pour ma personnalité, quand on est entraîneur, qu’on s’investit énormément, et qu’on a forcément envie de faire grandir les groupes, les clubs par lesquels on passe, ça correspond parfaitement à ma personnalité. Plus que joueur, où c’est plus égoïste, c’est moins moi. Même joueur, j’ai toujours fait passer le groupe avant moi, donc oui, je pense que ça me correspond mieux.

C’est quoi une journée-type de Didier Digard entraîneur ?
C’est long ! (rires) Une journée-type, c’est très long, sincèrement. J’arrive à 8 h 30 maximum, on revoit les derniers détails de la séance du jour. Je refais beaucoup de choses que j’ai faites la veille par acquit de conscience, dont la vidéo qu’on présentera, puisqu’on présente une vidéo chaque jour. Ensuite, on prend le petit-déjeuner avec le staff, on revoit les derniers détails qu’on a déjà vus pour l’entraînement, pour être sûrs… Parce que si les joueurs sentent que la séance est parfaitement cadrée, ça les pousse aussi à un niveau d’investissement. Plus que pour nous, c’est surtout pour eux, pour les pousser à toujours faire mieux, et leur montrer que, nous, nous essayons à chaque fois de faire mieux. Après, on a la séance, un débrief de la séance… D’abord un débrief du staff, voir ce que nous avons bien fait ou mal fait. Après, le débrief des joueurs, ce qu’on a vu. Puis on va manger, et après ça dépend si c’est une double séance ou pas. Mais l’après-midi, s’il n’y a pas de séance, je repars sur la même chose : préparer la séance du lendemain, la vidéo du lendemain, et après, échanger sur le match du week-end. On découpe chaque journée selon les phases qu’on veut voir le lendemain, mais on est obligés à la fin de parler du contenu global. On essaie de faire par catégorie puis on arrive à un contenu plus global. Après, tu as toujours une réunion ou deux, soit avec les joueurs, soit avec le staff, parce qu’on gère de l’humain avant tout. En moyenne, je vais dire que je rentre entre 18 h, si je suis fatigué, et 21 h. Ça dépend, en fait, il suffit qu’il y ait un match, et je vais rester le regarder ici (NDLR : à Soquence), parce que comme ça, en le regardant, on échange, on note des choses, par rapport à ce que nous voulons faire. Les malheureux, ce sont eux, le staff, parce qu’il y en a toujours qui ont envie de rester, et eux ont une famille, et moi elle n’est pas ici ! Ça fait des grosses journées ! C’est pour ça que j’essaie beaucoup de les soulager, avec des roulements, mais qu’eux rentrent le plus possible parce qu’on n’a pas besoin d’être tous ici. Mais oui, moi, mes journées sont bien remplies ! Ça reste des moments… Quand on est moins, c’est aussi un peu un moment privilégié, on prend plus le temps d’écouter la personne. Donc, voilà, je passe pas mal de temps ici !

Et tu n’as pas de temps pour toi ? Pour faire un truc vraiment pour toi ?
Mais je n’aime rien, en fait ! (rires) Franchement ! C’est compliqué… Sincèrement, à part le foot, il n’y a rien qui me plaise. Je n’arrive pas à m’intéresser aux autres choses. Sur le foot, je suis resté un gamin ! Ça me passionne vraiment, c’est pour ça que je peux regarder n’importe quel match. Je vais le regarder, et si j’ai envie de déconnecter, je vais décider de le regarder comme un enfant et en supporter, en passionné ! Si j’ai encore un peu de jus, je vais essayer d’être un peu plus pro, de déconnecter le regard juste du ballon et regarder ce qu’il se passe autour, d’avoir une vraie réflexion. En fait, je pense que la seule chose qui change dans ma vie, c’est de quelle manière j’ai décidé de regarder le match. Franchement, ça ne tourne qu’autour de ça.

Le stress du coach existe chez toi ?
Franchement, le stress existe, mais il n’est pas personnel. Je suis très à l’aise avec les règles du foot. C’est plus que je me dis que, si ça doit mal se passer, qui va en faire les frais ? Si ça se passe mal, ça veut dire que le club ne va pas bien, que l’équipe ne va pas bien. C’est ça qui me stresse, ce n’est pas mon avenir à moi, ce n’est pas le coach. Je suis très à l’aise avec ça. C’est de me dire que si ça ne va pas, c’est que le club ne va pas. C’est ça qui me dérange.

Le championnat te manquait ?
Ça me manquait vraiment ! Moi, quand il y a le foot, je reste un enfant ! (rires) Et j’étais le plus heureux du monde qu’il y ait la Coupe du monde des clubs, parce que ça me faisait du foot à regarder ! Et après, il y a les matches amicaux. Alors, dès qu’il y en a un qui passe, c’est pareil, je le regarde ! En fait, je trouve mes journées pauvres sans le foot. Donc, là, je suis content ! Il y avait la rentrée des classes pour nous samedi, mais vendredi, regarder le match, dimanche passer toute la journée à regarder les matches… ça me plaît ! Alors, forcément, que le championnat soit revenu, pour moi, c’est une très bonne nouvelle !

Propos recueillis par Olivia Detivelle

Photos : E. Lelaidier
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