13 mai 2025

Maxime Di Liberto : "Tous récompensés de ce travail acharné !"

Les Hacwomen ont terminé huitièmes du championnat d’Arkema Première Ligue s’étant achevé mercredi dernier. Retour avec Maxime Di Liberto, qui vivait sa première saison en tant qu’entraîneur principal…
Maxime Di Liberto : "Tous récompensés de ce travail acharné !"
Maxime, si tu devais résumer la saison en trois mots, lesquels utiliserais-tu ?
Historique, parce qu’on a réalisé beaucoup de choses qu’on n’avait pas faites les années précédentes. Magique. Et formatrice. Dans le sens où on a amené beaucoup de jeunes à jouer en équipe première, et aussi parce que c’était ma première saison au sein de l’équipe première, c’est donc toujours enrichissant de trouver de nouveaux postes.

Qu’as-tu appris, toi, au fil de cette saison ?
Je connaissais déjà le niveau Arkema Première Ligue. J’ai appris qu’il faut de tout pour faire un monde ! Des joueuses âgées, des jeunes, et des entre deux. J’ai appris aussi qu’on n’est jamais perdu ! C’est-à-dire, que même quand on pense qu’on est au fond du gouffre, que tout va mal, on peut arriver à trouver du positif. Et autre point que j’ai appris, c’est que quelquefois, il faut arrêter de lutter contre les forces extérieures et celles qui sont contre ce qu’on met en place, qui vont à l’opposé de nous, de moi, du club, de l’équipe. Il faut rester concentré sur sa tâche, ne pas s’occuper de l’environnement, avancer. Ce qui veulent avancer montent dans le bus, ceux qui ne veulent pas en descendent. Arrêter de perdre de l’énergie à essayer de convaincre. Être convaincu, parce que moi j’étais convaincu en début de saison qu’on allait y arriver même si la tâche était difficile, et les gens qui ne veulent pas être convaincus, on ne perd pas de temps, pas d’énergie avec eux, et on travaille, on continue avec ceux qui ont envie d’avancer.

Et les gens en qui tu penses déceler un potentiel, tu as tendance à les pousser, à les piquer davantage ?
Il y a toujours des joueuses à qui tu réclames plus, comme quand j’ai pu avoir certaines paroles envers Chancelle Effa Effa ou Mélinda Mendy, qui sont des espoirs du club. On attend plus, donc on essaie de tirer sur tous les leviers pour voir plus de motivation, d’efficacité, de performances, individuelles et collectives. On essaie de cibler sur certains matches les filles qui pourront faire des différences, sur certaines périodes des filles qui se sentent mieux que d’autres, de les mettre un peu plus en avant, faire reposer les autres, pour qu’après, dans une autre dynamique quelques semaines plus tard, celles qui étaient au repos repassent devant les autres, pour continuer de faire avancer cette locomotive qui a tiré tout le monde durant la saison.

As-tu douté à un moment ?
Douté, non. J’ai confiance en moi, en les gens qui m’entourent. Si j’ai accepté le challenge avec Laure, c’est que j’avais confiance en elle, qu’elle avait confiance en moi, et on savait qu’on allait arriver à mener ce bateau à destination ! Même s’il y a eu beaucoup de péripéties, on a pris beaucoup de tempêtes, d’orages, de pluies en pleine tête ! Mais il fallait faire front, et ce sont aussi tous ces échecs qui… Souvent, derrière des échecs, il y a des opportunités ! Des opportunités de rebondir, de faire autre chose ! Le doute, non, il ne s’est jamais installé. Ce n’est pas le mot « doute » qui s’est installé, c’est quelquefois plutôt l’impuissance, quand on travaille, quand on s’entraîne dur et qu’autour de vous, il y a des paramètres… Je reviens sur ce match à domicile contre Reims, en novembre, on perd 3-0, alors qu’elles sont dernières, qu’elles ont zéro point. Si on gagne, on leur met sept ou huit points d’avance ! Et on marque, le but est valable et n’est pas validé, et derrière on prend 3-0 sur trois frappes, trois buts. Il n’y a pas le doute mais une impuissance car, ces choses-là, on ne les contrôle pas. Je ne pouvais pas agir sur certaines choses qui auraient dû tourner en notre faveur. Comme je disais souvent au staff, aux joueuses : « Restez concentrés sur ce qu’on contrôle. » L’entraînement, les changements, la tactique, la dynamique de jeu, comment on gère le tempo du match… se concentrer, concentrer toute notre attention sur ça. Et après, quand on s’est bien concentrés sur ça, comme par hasard, ça a tourné, et les décisions ont été un peu plus en notre faveur.

C’est ça, la morale de la saison ? Que quand toi, tu fais les choses bien, à un moment ça va payer ?
Ce sont les valeurs de mes parents, l’éducation que j’ai eue. On m’a toujours dit : « Tant que tu travailles, ça paiera. » C’est le mot d’ordre que j’ai depuis que je suis entraîneur, ça va faire bientôt dix ans. J’ai toujours été persuadé, dès la première séance, que c’était en travaillant qu’on allait y arriver, pas en attendant des autres. Je pense avoir une grande faculté de positivisme au quotidien. Quand on prend 8 à 0 au Paris FC à la 2e journée, je pense que je suis l’un des rares coaches qui le lendemain en vidéo a montré aux filles qu’en fait c’était un très bon match. Oui, le score est lourd, mais le contenu était très bon. La seule chose, c’est qu’elles avaient des joueuses, qui, déjà, ont raflé tous les trophées à la fin de l’année, plus expérimentées. On a eu les mêmes situations qu’elles, sauf que nous, on n’a pas marqué, parce que notre jeunesse a fait que l’on maîtrise moins les gestes, les émotions. Donc, du travail et toujours du positif, même dans les moments les plus difficiles. Soit on s’apitoie sur le sort, soit on repart en reconquête, on essaie, on essaie, et, la preuve, depuis décembre, même début novembre même si on ne prenait pas de points, ce caractère, cette dynamique, cette intention de bien faire et de continuer à travailler malgré les échecs, ça nous a donné l’opportunité d’enchaîner les points et de remonter rapidement au classement.

Et de signer une demi-finale de Coupe de France !
Oui… S’il manque quelque chose au gâteau, c’est cette cerise. Je pense que le groupe aurait mérité d’avoir cette séance de tirs au but. Après, on passe, on ne passe pas, mais on aurait mérité que ce fichu ballon de Mélinda Mendy rentre à la 90e, parce que Laetitia Philippe nous sort la parade quelques minutes avant pour éviter le 1-3 face à Bourdieu. En regardant le positif, on peut se dire qu’on a perdu contre le vainqueur !

De quoi es-tu le plus fier ?
La première fierté est d’avoir fait ce que les gens ne voulaient pas qu’on fasse ! En gros, avoir plein de détracteurs, et quand on me nomme, beaucoup de personnes disent qu’on ne va pas y arriver, parce que je n’ai pas d’expérience, parce que je n’ai jamais pris un groupe senior filles… Oui, et alors ? De grands entrepreneurs, comme Vincent Volpe, notre actionnaire, ont commencé en bas de la chaîne avant de monter. Si on ne lui avait pas tendu la main à un moment donné, il ne serait pas arrivé là, il n’aurait jamais racheté le club, le club ne serait pas en Ligue 1, et la section féminine n’aurait pas existé ! Donc, ma plus grande fierté est d’avoir fait quelque chose que tout le monde croyait impossible. Rendre possibles les choses, je trouve ça magique ! Ma deuxième fierté est d’avoir continué la transition entre les jeunes et l’équipe première et d’avoir apporté cette jeunesse qui ne demande qu’à apprendre là-haut ! Et en même temps, d’avoir fait accepter aux plus grandes que cette jeunesse, on en aurait besoin ! Les jeunes ont joué le jeu, les pros aussi, et cette intergénérationnelle a été exceptionnelle, c’est une grande fierté. Parce que beaucoup de jeunes auraient jeté l’éponge, car c’est très dur pour elles, et beaucoup de joueuses plus expérimentées auraient peut-être fait pareil parce que ça ne les intéresse pas de s’entraîner avec des jeunes car elles aussi veulent progresser. Mais le mélange et le discours du quotidien ont fait, et c’est le troisième point de fierté, que l’équipe est remontée comme ça à la surface alors qu’on continuait à nous enterrer. On a réussi ensemble à le faire, et les joueuses ont ce mérite. Depuis décembre, on n’a que quatre défaites, toutes compétitions confondues, deux contre le Paris FC, 3e et vainqueur de la Coupe de France, une contre Dijon, 4e, une contre Lyon, 1er. C’est exceptionnel, et c’est une grande fierté d’avoir porté l’équipe. Alors, je me mets en retrait sur ça, parce qu’on est coach, c’est nous qui faisons la tactique, qui disons les choses, mais les joueuses, ce sont elles qui courent, qui se font les passes, qui ont envie de jouer. Elles auraient pu lâcher en décembre, quand on était derniers ou avant-derniers. Non, elles ont été solidaires entre elles, avec le staff, même s’il y a des périodes plus compliquées, où c’est plus facile de ne pas s’analyser, de rejeter la faute sur le coach ou sur une partenaire… Oui, on peut toujours critiquer les gens, voir leurs défauts, mais ce n’est pas ma nature, on en parle avec Laure, et on sait que les personnes ont des qualités et des défauts. Ce qui m’intéresse, ce sont les qualités des personnes. C’est ce qu’on a mis en place tout au long de la saison. Aujourd’hui, on est tous récompensés de ce travail acharné.

As-tu changé ta manière de manager ?
Oui, je me suis surpris sur ça. J’ai des convictions, une manière d’entraîner, une manière de jouer. Beaucoup de coaches essaient de copier des modèles, moi, je ne suis pas ce type de coach ne voyant le football que d’une manière. J’aime que mon équipe se donne à fond, mette de l’intensité, je veux voir des battantes, des filles qui courent, qui s’arrachent pour les couleurs du club, pour aller chercher des scores. La première chose, c’est la mentalité, donc j’ai beaucoup axé là-dessus. Après, j’ai parfois réussi à écouter les joueuses, le staff. J’ai beaucoup travaillé seul toute ma carrière, donc il y a une petite période d’adaptation au début sur le fait d’avoir un staff étoffé autour de moi et des joueuses avec de l’expérience comme Laurie Cance ou Laetitia Philippe, qui, avec du recul, m’ont beaucoup aidé sur la vision que j’avais de l’ensemble. J’étais un fonceur, je prenais le sac et je le tirais, je prenais l’avion et je le tirais moi-même ! Je me suis aperçu qu’à un certain moment, je ne pouvais pas forcer tout seul et qu’il fallait que je m’entoure d’autres personnes. Et cette arrivée en équipe première m’a permis cela, de m’entourer, comme de Woury Ndongo, mon adjointe, qui m’a beaucoup aidé dans le relationnel avec les joueuses. Il n’est pas facile au quotidien de prendre des décisions justes sans entrer dans l’empathie et sans faire copain-copine avec les joueuses, parce que j’estime que dès qu’on rentre dans l’empathie, on fait les mauvais choix. Parfois, c’est dur pour les joueuses de comprendre cela, si elles ont été habituées à des coaches très proches d’elles. Ce n’est pas ma façon de fonctionner, je laisse ça à mon adjointe d’être proche des joueuses, de discuter, d’échanger, parfois d’éteindre le feu s’il y a des incompréhensions, ou de m’envoyer carrément les joueuses, et a contrario de souffler parfois sur les braises parce que ça s’étouffe un peu et qu’il faut ranimer la flamme. Donc, Woury a eu un gros travail sur le côté relations humaines. Après, ce que j’ai pu changer, on peut appeler ça du management, j’étais beaucoup sur le collectif sur le début de saison, où toutes mes prises de parole, mes coups de gueule, mes retours étaient sur le collectif, et en deuxième partie de saison, j’ai inversé, j’étais beaucoup plus sur l’individuel, à demander aux joueuses d’échanger. Il y a aussi un autre point sur lequel je me suis amélioré, il y a encore des progrès à faire de par mon jeune âge, mais la gestion des émotions est un peu mieux ! Parce que je suis quelqu’un qui vit les matches, et comme je dis aux joueuses, mais elles ont compris, que quelquefois un « Reviens ! » fort ne veut pas dire que je t’engueule, je le dis fort parce que je me dis que comme elle l’entend fort, ça agit vite sur le cerveau ! Je pense que ça, on a réussi à le régler avec les joueuses et le staff sur l’ensemble, et c’est ce qui a fait notre force. Et après, prendre du recul, parfois. Je suis un gros travailleur, mes journées peuvent aller de 8 h à 21 h, que football, et j’ai eu des super collègues ou même des mentors qui m’ont dit de ne pas rester au bureau quand il n’y avait rien de particulier, de rentrer chez moi ! Et je ne le comprenais pas au départ, jusqu’à cette saison où c’est vrai que, parfois, je me suis octroyé de partir plus tôt, pour aller prendre un café, pour aller marcher, pour faire du sport, pour m’aérer, pour enlever toute cette tension qu’on a en tant que coach. De par mes relations anciennes, je n’avais pas compris le message d’un président d’un club de Ligue 1 qui m’avait dit : « Tu verras la pression. » Parce que, la pression, je ne la subissais pas avant, en tant que numéro 2 dans différents staffs ou en tant que responsable formation. On se met toujours une forme de pression, on veut que l’institution soit contente, former des meilleures joueuses, bien recruter… mais là, j’ai compris un peu plus ce qu’était d’avoir la pression. Je ne pense pas à la pression venue de la direction, de Laure, je n’en ai jamais eu, j’ai toujours eu du soutien, c’est super et je l’en remercie, mais de la pression de l’extérieur, j’ai appris que des gens veulent la place, que certaines appellent pour la prendre après un match… Ou les supporters qui ne sont pas contents, ce qui est normal. Cette pression donc vient quelquefois. Mais j’ai réussi à avoir un entourage de la famille ou des copains très réconfortant. Mon staff aussi. Et ne pas perdre cette boussole qui nous menait vers ce maintien, continuer, continuer. La mission est accomplie, les grands traits ont été signés, on a écrit de super chapitres, et je pense que tout ça va nous aider, va m’aider sur la prochaine saison. Ça permettra peut-être d’avoir des résultats plus tôt dans la saison.

Un moment particulier à retenir ?
La victoire à Montpellier en championnat ! Je ne suis pas né là-bas mais c’est chez moi. D’y revenir, il y avait de l’émotion pour moi, revoir les gens qui m’ont lancé, qui m’ont fait être entraîneur. Et l’émotion parce qu’on sortait encore d’une défaite (NDLR : 0-2 contre le Paris FC), on allait les jouer deux fois, on se disait que si on prenait un point, ce serait très bien, et en fait… C’est un moment qui m’a frappé, parce que tu es à Grammont, tu as toute ton émotion personnelle et intime qui est là parce que tu connais tout le monde et tu n’as qu’une envie, battre ce club, et tu te demandes si le groupe va bien réagir, parce qu’on est encore sur une défaite, certes positive. Et d’un seul coup, je vois une équipe métamorphosée. Il y a des choses qui ne s’expliquent pas ! Je le dis souvent, mais une Ikram Adjabi qui faisait des entrées, de bonnes choses, mais qui n’arrivait pas à enchaîner, Chancelle, sur son premier ballon, but, Laurie qui marque… Des joueuses monstrueuses, Lisa qui fait l’arrêt alors que peut-être avant elle aurait pris le but… Je sens un groupe comme je ne l’avais jamais senti, solide, serein, prêt à aller à la guerre avec de vrais outils, et on ramène un 3-1, pratiquement un 3-0 parce qu’à la 97e il y a 3-0 ! Et à 3-0, je m’en souviens, un membre du staff me dit gentiment : « Tu t’es assis ! » Parce que je suis tout le temps debout, et limite, ça les a un peu perturbés ! Mais oui, en fait, à 3-0, je me suis assis et je me suis dit que oui, on allait gagner le match ! Je me disais qu’avec l’armada qu’elles ont en face, à tout moment, si elles revenaient à 2-1, on aurait, je pense, fait 2-2. A 3-0, s’asseoir, laisser le cours du jeu faire, et faire « pfffouuu » ! Et à partir de là, on se dit que c’est parti. Et une semaine plus tard, on remet le couvert en Coupe, et on enchaîne, on enchaîne ! Ce match-là, c’est la plus grande émotion positive. Il y a d’autres émotions, comme la demi-finale, mais qui laissent un goût d’amertume. C’est ce match-là, à la 13e journée, c’est peut-être ce chiffre 13 qui nous a porté bonheur, qui fait basculer le groupe, la dynamique, la section féminine dans une autre dimension.

Propos recueillis par Olivia Detivelle
StrasbourgVSHAC
Strasbourg - HAC
17/05/2025
21:00 - Stade de la Meinau - dazn
Billeterie
HACVSMarseille
HAC 1 - 3 Marseille
10/05/2025 - 21:00 - Stade Océane -
33ème journée de Ligue 1
34ème journée
17/05/2025 Strasbourg - HAC
*/?>