15 mai 2012

La VMA à l'épreuve du HAC

 

Pour savoir comment les tests VMA étaient utilisés dans le football, le magazine Sport et Vie est venu au HAC, l'un des club qu'ils jugent les plus en pointe sur le plan de la préparation athlétique ! Ils nous ont autorisé à reproduire l'interview de Guillaume Marie, préparateur physique du HAC…

 

Guillaume Marie (38 ans, en photo ci-dessous) est préparateur physique du HAC depuis trois ans. Auparavant, il s'était occupé des joueurs du Mans et de Troyes où il entraînait également l'équipe réserve. Lui-même a joué en équipe de France Universitaire et a mené une courte carrière professionnelle sous les couleurs des équipes de Caen et de Châteauroux.

 Vous pouvez retrouver cet article dans le numéro 123 de "Sport et vie"

 

Faites-vous passer des tests VMA à vos joueurs?
Oui. Nous bloquons trois jours en début de saison pour les soumettre à différents tests physiques d'évaluation. Dans le lot, on prévoit bien sûr de leur faire passer une VMA. Le protocole est assez simple. On court sur tapis roulant pendant des paliers de trois minutes en alternance avec une minute de repos durant laquelle on fait une prise de lactates. On augmente chaque fois la vitesse: 10, 12, 14, 16 km/h. Jusqu'à ce que le joueur ne puisse plus suivre. Le record est détenu par Walid Mesloub qui a tenu bon jusqu'à 20 km/h et il a trouvé encore la force de faire une minute à 22 km/h. Mais c'est exceptionnel! La moyenne des joueurs se situe plutôt autour de 18 km/h.

Se sert-on des résultats pour établir un programme d’entraînement personnalisé?

C'est le but, effectivement. En début de saison, on rédige un programme pour chaque joueur en déterminant les intensités d'effort par des zones cibles de fréquence cardiaque. On travaille comme cela jusqu'à l'entame du championnat. A partir de là, le rythme des matchs fait qu'on ne peut plus véritablement effectuer du travail foncier. On se contente de gérer les acquis.   

Vous proposez ce test VMA une seule fois dans l'année?
Non, on le repasse après la trêve. Mais dans une forme escamotée. Là, je demande seulement aux joueurs de courir 5 minutes à 10 km/h et puis 3 minutes à 14 km/h. Je fais une prise de lactates et je peux alors comparer avec les résultats d'avant saison pour voir où ils en sont.

Pourriez-vous vous passer de faire le test du taux de lactates?

Oui, ce serait possible. Il est effectivement assez rare de découvrir dans l'évolution des lactates quelque chose qui ne serait pas apparu dans le suivi de la fréquence cardiaque. Mais ces dosages sanguins restent assez utiles pour tracer le profil énergétique du joueur et sa capacité à supporter plus ou moins bien des taux de lactates élevés. Sur base de tous ces tests, on répartit ensuite les joueurs au sein de quatre groupes d'entraînement aux profils homogènes. Et on travaille exactement de la même manière avec les jeunes du centre de formation qu'avec les joueurs du noyau professionnel.

Quels autres tests passez-vous pendant les trois jours d'évaluation d'avant-saison?
On procède à des relevés de forces musculaires sur une machine isocinétique en faisant varier les vitesses angulaires. La puissance en concentrique se mesure à 60 et 180 degrés/seconde. Pour l'excentrique, on choisit des vitesses moins élevées, entre 30 et 60 degrés/seconde. Cela nous permet d'établir différents ratios et de déceler d'éventuelles faiblesses. Les études montrent qu'un déséquilibre de puissance entre les muscles à l'avant et à l'arrière de la cuisse se trouve corrélé à une survenue plus fréquente de blessures comme la déchirure du ligament croisé antérieur du genou. Les kinés se basent alors sur ces résultats pour mettre en place un programme de renforcement spécifique et agir préventivement. 

Vous leur faites faire de l'électrostimulation?
En phase de récupération, on propose effectivement des séances avec des courants faibles (10 Hertz) pour améliorer l'irrigation du muscle et favoriser le phénomène de capillarisation. On s'en sert aussi pour des séances de renforcements musculaires spécifiques chez des joueurs fragiles auxquels on veut épargner des contraintes articulaires trop sévères.
 
Pas de tests de détente?
Si, bien sûr. J'utilise différents outils comme l'Optojump et le Myotest pour faire des relevés de puissance musculaire. Ce sont les tests classiques: Drop Jump, Counter Movement Jump, les 5 rebonds (*). Toutes ces données sont reprises dans une fiche signalétique propre à chaque joueur. D'autres clubs vont encore plus loin et recourent au GPS. C'est très à la mode! L'une des premières décisions d'Ancelotti à son arrivée au PSG fut d'ailleurs d'équiper les joueurs de ces appareils. A l'issue de la séance, les préparateurs physiques savent exactement combien de bornes ont été couvertes par chaque joueur, à quelle vitesse moyenne, quelle a été la vitesse de pointe, etc. L'utilisation de ces GPS serait aussi riche d'enseignements pendant les matchs mais, contrairement à ce qui se passe dans le rugby, ces appareils sont toujours interdits dans le football.

Les joueurs sont-ils réceptifs à ce genre d'évaluation?
Les joueurs de l'élite font des tests depuis l'âge de dix ans. A vingt ans, ils connaissent leurs paramètres sur le bout des doigts. Détente sèche, VMA, etc. Cela n'a plus de secret pour eux. Lorsque je propose une nouvelle batterie de tests, je m'efforce de bien leur faire comprendre qu'il ne s'agit pas d'établir un classement entre eux ou de procéder à une énième évaluation sans suite. Je leur explique le principe de ce travail de profilage et surtout le but qui consiste en somme à les rendre individuellement le plus performant possible, tout en leur évitant les blessures!

Dès le moment où vous avez ciblé les forces et les faiblesses de chacun, que faites-vous? Est-ce qu'il vaut mieux travailler ses points faibles ou exploiter ses points forts?
Bonne question! En fait, cela dépend du moment de la saison. Au début, on aura plutôt tendance à vouloir renforcer les points forts. Lors des séances de fractionné, par exemple, un joueur explosif devra produire des efforts courts, entre 3 et 20 secondes, alors qu'un autre, au profil plus endurant, travaillera sur des durées plus longues, entre 15 secondes et 3 minutes. C'est le meilleur moyen que j'ai trouvé pour améliorer leur VMA respective. De plus, chaque joueur se voit proposer des exercices dans lesquels il excelle. Cela renforce la confiance en soi. Pendant la période hivernale, changement de cap. Cette fois, on met l'accent sur les points faibles. Les plus puissants font de l'endurance. Aux plus endurants, on propose des efforts de type explosif. On cherche ainsi à progresser sur les deux tableaux.

Vous rendez-vous aussi en laboratoire?
Non. On fait tout au sein du club. Dans le cadre de leur préparation physique, les joueurs ne sortent du centre qu'une seule fois pas an pour faire une échocardiographie d'effort chez le médecin. Pour le reste nous sommes bien équipés au club. Et on ne mesure plus la VO2 max. En fait, cette donnée brute ne nous aide pas beaucoup pour comprendre les fluctuations de forme. En revanche, j'utilise une échelle de Borg. Après chaque séance d'entraînement, je demande aux joueurs d'évaluer leur propre forme par une note de 1 à 10. C'est purement subjectif. Pour rendre les choses plus claires, j'ai inversé l'échelle de Borg en calquant le système scolaire français: 10/10 constitue la meilleure note, 0/10 la plus  mauvaise. Alors que dans l'échelle originale où l'on demandait d'évaluer la fatigue, 10/10 signifiait qu'on était complètement cuit!

En quoi cela vous aide-t-il?
Je remarque que des sensations déclinantes annoncent souvent une blessure. Ce n'est pas systématiquement le cas. Mais cela arrive assez régulièrement pour qu'on s'en inquiète. A l'inverse, j'ai parfois l'impression que celui qui se situe au mieux de sa forme sur le plan physique se trouve plus exposé sur le plan immunitaire. Encore une fois, il ne faut pas en faire une règle immuable. Mais les joueurs qui s'estiment en pleine bourre tombent malade assez facilement!

Toutes ces données sont-elles partagées avec l'entraîneur?
Oui, bien sûr. L'entraîneur est tenu au courant des résultats, même si les critères athlétiques ne sont évidemment pas les seuls qui doivent être pris en considération pour former l'équipe. La personnalité du joueur, sa technique, sa compréhension du jeu, son intelligence tactique: tout cela compte énormément. Les Hollandais utilisent les initiales "TIPS" pour définir ces quatre qualités: T pour Technique, I pour Intelligence, P pour Personnalité et S pour Speed (la vitesse).

Est-ce que cela peut influencer le recrutement?     
Eventuellement. Au Havre, par exemple, on possède une équipe avec de très bonnes qualités d'endurance. De façon générale, nos joueurs possèdent de bonnes qualités de pied. Mais certains postes requièrent davantage de puissance. Le problème se pose surtout en hiver lorsqu'on doit évoluer sur des terrains lourds. Sortir de la boue, cela demande de la force. Donc des tests qui feraient apparaître un déficit d'explosivité pourraient influencer la politique des dirigeants en matière de transfert.

Est-ce qu'il arrive que les clubs échangent ces fiches de profilage pour vérifier par exemple les qualités d'un joueur dans la perspective d'un transfert?
Non. Les données athlétiques restent la propriété du club. Quant un joueur arrive, il passe entre les mains du docteur qui pourra éventuellement casser le contrat si on décèle un problème de santé. Mais une mauvaise forme physique ne constitue pas une raison suffisante. De toute façon, on ne peut pas se tromper de beaucoup. Des sociétés comme AMISCO permettent désormais de visualiser tous les matchs de tous les joueurs de l'élite. On voit tout de suite s'ils couvrent du terrain ou s'ils passent l'essentiel du temps mains aux hanches.

Existe-t-il de grandes différences dans la façon de concevoir la préparation physique au sein des différentes équipes de l'élite?

Personnellement, j'ai travaillé pendant deux ans au Mans avec un préparateur physique italien. Il prêtait un maximum d'attention au développement musculaire. On testait les joueurs sur des efforts très brefs et très intenses avec beaucoup de sprints courts, des changements de direction, des sauts. Les exercices se déclinaient aussi de façon très différente selon les postes. En revanche, je crois qu'on n'a jamais parlé de VMA. Même chose en Angleterre. Je ne suis même pas sûr qu'ils sachent de quoi il en retourne là-bas. En France, les entraîneurs sont davantage dans la culture de l'aérobie. On fait plus de fractionné. C'est une question d'école.

Les meilleurs joueurs sont-ils également les meilleurs aux tests?
Pas forcément. Disons qu'on remarque des différences selon les postes. Ainsi les joueurs de milieu de terrain sont généralement plus endurants que les autres. A l'autre extrême, on trouve évidemment les gardiens. Enfin, seuls quelques joueurs d'exception parviennent à briller sur tous les tableaux. Ces joueurs-là évoluent plus souvent en Ligue I que dans les divisions inférieures.
Propos recueillis par Gilles Goetghebuer

(*) Le Drop Jump (DJ) se réalise en gardant les mains aux hanches. On saute à partir de caissons de 30, 45, 60, 75 centimètres de hauteur et on rebondit le plus haut possible. Pour le Counter Movement Jump (CMJ), on se tient, là encore, mains aux hanches, le buste vertical et on se détend après une courte et rapide flexion des jambes. Enfin le test des cinq rebonds évalue les qualités de pied de l'athlète. Comme son nom l'indique, il s'agit de rebondir rapidement sur la pointe des pieds.

 

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