7 avril 2020

Olivier Rodriguez : "Varier pour éviter de tourner en rond"

Après 3 semaines de confinement nous faisons un nouveau point avec le préparateur physique Olivier Rodriguez. Il a la lourde tâche de faire en sorte de maintenir les joueurs qui s'entraînent chez eux dans les meilleures conditions physique possibles.
Olivier Rodriguez : "Varier pour éviter de tourner en rond"
Olivier, après trois semaines de confinement, comment continuez-vous à gérer à distance le programme d’entretien physique des joueurs ?
On continue toujours de la même manière, en les contactant ou avec des messages via SMS ou le groupe WhatsApp. Nous essayons avec le staff de maintenir le lien, que ce soit Paul Le Guen, Yves Colleu, Christian Mas, Romain Hequet et moi-même, nous essayons de rester en contact avec les uns et les autres. Le but est de maintenir les joueurs en éveil car nous ne savons pas quand nous reprendrons la compétition et donc quand vont reprendre les entraînements. Nous sommes toujours dans cet inconnu, alors il nous faut rester proches du quotidien d’un footballeur de haut niveau. Après avoir réactualisé le programme dans un premier temps, je suis passé de principes généraux à un circuit training un peu plus difficile, puis un deuxième circuit training plus difficile que le premier. Je me suis renseigné auprès de chacun des joueurs pour savoir de quels matériels ils disposaient et j’ai fait des aménagement afin qu’ils tirent le meilleur de l’appartement avec balcon ou pas, de la maison avec jardin ou pas. En fonction de cela, j’ai établi un programme adapté à chaque joueur qui en a fait la demande et j’en ai profité pour tous les inviter à travailler sur leurs facteurs limitants. Ceci en coopération avec Adrien et Arnaud, les kinésithérapeutes du club, qui sont aussi présents pour les guider dans cette démarche. Par exemple, pour un joueur qui serait en délicatesse avec ses adducteurs, c’est certainement le bon moment pour mettre en place un protocole et bien travailler dessus.


Le programme que vous donnez aux joueurs évolue, vous nous parlez d’un deuxième circuit training plus difficile que le premier, en quoi cela consiste-t-il ?
Nous en sommes à la troisième étape du programme. Déjà, les règles du confinement ont évolué et il devient difficile pour les joueurs de sortir faire des footings. Pour cette troisième étape, je leur ai donc donné un deuxième circuit training. Il y a différents circuits training : pour le haut du corps, le bas du corps, la proprioception… J’essaie de varier pour éviter que l’on tourne en rond, car au bout de trois semaines de travail dans ces conditions, nous pouvons arriver à une certaine forme de lassitude, surtout pour ceux qui n’ont pas de jardin. Donc il va falloir que je me creuse la tête pour les programmes de ceux qui ne disposent que d’un espace limité pour éviter cette lassitude.


Vous dites vouloir éviter une « certaine forme de lassitude », craignez-vous un risque de « décrochage » de la part de certains joueurs ?
C’est peu probable car nos joueurs sont de vrais professionnels. Mais il est toujours difficile pour un sportif de ne pas avoir un objectif clairement défini devant lui. On ne sait toujours pas lorsque nous allons reprendre et, il ne faut pas le nier, il y a une charge mentale : le joueur de foot est un citoyen qui a des proches, le nombre de décès est important, il y a donc aussi de l’inquiétude car personne n’est à l’abri de tomber malade du Covid-19. il y a une inquiétude générale, une tension, tout cela est à prendre en compte. Il faut donc composer avec le réel et le rendre malgré tout compatible avec le quotidien d’un sportif de haut niveau, un quotidien qui ne peut se vivre comme d’habitude.. On peut même imaginer que certains joueurs commencent à se demander s’ils vont retrouver leur niveau ou de combien de temps ils auront besoin pour le retrouver. Ce sont des problématiques mentales qui peuvent aussi exister.


Est-ce dans ces moments-là que les joueurs ont besoin d’être encouragés ?
Je sais que Paul a appelé tous les joueurs pour prendre de leurs nouvelles et garder les liens. C’est important au-delà des relations de travail, le sport de haut niveau crée des liens particuliers entre les gens. Il est essentiel de garder ces liens, de les cultiver, et l’ensemble du staff technique, avec également Yves, Christian et Romain, communique régulièrement avec les joueurs.


Vous parlez du staff, comment se passe la collaboration entre les différents membres qui le composent ?
Nous faisons des points quasi quotidiennement. Ce sont des appels où nous faisons le point sur beaucoup de choses, et pas uniquement sur le plan sportif, les situations sanitaires, politiques et économiques sont aussi des sujets de préoccupations importants.

"Le but d’un entraîneur est de réduire les hasards"

Avec un confinement qui dure, jugez-vous nécessaire aussi de faire des petits rappels, comme des conseils sur l’alimentation ?
On leur rappelle de temps en temps, mais la position du staff est de faire confiance aux joueurs, donc nous partons sur un contrat de confiance. La seule chose que nous faisons dans nos communications est de leur mettre de petits rappels sur l’hygiène de vie : faire attention au sommeil, au rythme du quotidien, à la qualité de l’alimentation, et garder un poids qui soit aussi le plus proche du poids de forme. Lorsque nous reprendrons l’entraînement, je suppose que nous n’aurons pas plus de quinze ou vingt jours pour nous préparer, si en plus il y avait des prises de poids, cela deviendrait compliqué.


Les joueurs publient sur les réseaux sociaux et nous envoient pour le site du club des extraits de leurs séances d’entraînements, en profitez-vous pour observer un peu leur travail ?
Je les regarde, mais de loin en loin, ce sont des professionnels, je leur fais confiance et je les ai régulièrement au téléphone. Nous avons des joueurs consciencieux, travailleurs, et qui ont à cœur de bien faire les choses. Je regarde ces vidéos avec un double regard : celui du professionnel que je suis, mais aussi le regard de quelqu'un qui apprécie de voir des personnes se prendre en main et ne se laissant pas aller.


On l’avait déjà évoqué il y a deux semaines : avant de reprendre la compétition, les joueurs devront suivre une période de préparation de plusieurs semaines. Pensez-vous qu’ils auront également besoin d’une forme de préparation mentale pour que les têtes soient elles aussi totalement impliquées ?
Il faut différencier la préparation mentale du groupe et la préparation mentale individuelle. Là-dessus, dans les deux cas, je fais pleinement confiance à Paul et à Yves qui ont une énorme expérience en ce domaine. Ils sauront trouver les mots et impulser la bonne dynamique. Si des joueurs ont des demandes particulières, nous les aiderons bien entendu .. Mais je suis persuadé qu’après cette période, stressante pour tout le monde, les joueurs auront beaucoup d’enthousiasme. Nous occupons au classement une position qui autorise les espoirs et ce n’est pas le cas pour certains clubs qui n’auront pas cette "carotte-là". Tous les clubs ne seront pas égaux face aux objectifs, je pense que nous allons utiliser ce levier-là pour activer une vraie dynamique et qu’elle ne sera pas très difficile à impulser car nous ne sommes qu’à une place des barrages. Le challenge sera passionnant à vivre à condition, bien évidemment, que nous soyons sortis de cette guerre sanitaire et que nous puissions jouer en toute sécurité. En ce moment, le réel, l’actualité font mal... mais il nous faut malgré tout envisager la reprise car la vie devra tôt ou tard reprendre son cours. Si les conditions sanitaires le permettent il y aura un vrai beau challenge à relever.


Et pour cela, un rythme soutenu de la fin de championnat permettrait-il de garder les joueurs conditionnés ?
Oui, et ce qui sera important, ce sera le démarrage. Les premiers matchs seront très importants car il ne reste que dix journées, et si tu démarres bien, tu engages un sprint final qui peut être passionnant. Je n’oublie pas qu’après notre préparation estivale, nous avons démarré pied au plancher, là aussi il y a des motifs d’espoir. Le but d’un entraîneur est de réduire les hasards, si nous faisons un bon démarrage encore une fois, cela finira par ne pas être un hasard !

Propos recueillis par Emmanuel Lelaidier



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